T’avais besoin de t’aérer la tête,
Besoin de te noyer dans la fête,
Besoin de— ((Cass. Arrête.))
Dans l’isolement de l’espace, tu te sens à ta place parce que personne ne ressemble à personne. Pourquoi se réfugier dans les rêves quand la réalité s’accroche à tes bras de ses griffes rouillées. Mais Cass, de qui tu te moques, toi c’est pas les songes qui t’intéressent mais les pixels. Ton cerveau, il est infecté, le virus de la haine le consume et ça te dévore de l’intérieur. Alors parfois, t’as besoin de lâcher prise. Parfois, t’as besoin de te déconnecter.
La musique bourdonne dans ton oreille, fait grésiller ton appareil. D’un geste las, tu désactives le système, tu te détaches de la scène, tu éteins ton oreille. Tu n’écoutes pas vraiment, tu n’écoutes plus vraiment, tu te contentes d’exister et laisse ton corps se mêler à la foule, ta chair frôler celles des autres et, les yeux fermés, tu respires.
((Respire))
((Respire))
((Respire))
Et t’es plus là.
T’es ailleurs.
((T’es dans ta tête))
Mais pas longtemps, pas profondément. Un impact suffit à te ramener sur Terre, t’as le regard en l’air, le cerveau en bandoulière. Finalement, ses yeux s’accrochent aux tiens, elle te dévisage, tu ne sourcilles pas. Et tu pourrais disparaître de nouveau, oublier son visage dont tu ne te rappelles déjà plus, retourner dans ta bulle. Mais les frontières sont passées, la muraille percé, tu sens son souffle alcoolisé dans ta nuque, sur ton lobe, ton tympan vibre de mécontentement alors que, sans ménagement, tu t’éloigne. T’as pas entendu sa question, tu t’en fous un peu mais elle semble avoir trouvé sa réponse dans ta désinvolture.
Ca aurait pu s’arrêter là, mais elle a l’air bourrée —ou piquée, tu sais jamais trop avec les femmes— et elle s’accroche, elle te garde sous ses griffes et t’empoisonne dans sa fumée imbibée de nicotine. Silencieusement, tu refuses sa proposition, pas envie de t’intoxiquer ce soir, peut être plus tard. La conversation se poursuit sans vraiment que tu ne saches comment, l’avantage des extravertis, c’est qu’ils font un peu la conversation tous seuls. Tu te contentes de bout de phrases, de silences parlants et de regards sans fond.
Et d’un coup, c’est la hâche qui te tranche la gorge.
Ca te tend, ça te prend au cou.
Mais tu t’emportes pas.
((Pour l’instant))
« — Cass. Cass, c’est suffisant.
Parce que Cassius, c’est le choix de ton père. Et Cass, c’est le tien. Et comme si ça suffisait pas, elle veut pousser le jeu plus loin, elle titille ta colère, probablement sans le savoir. Mais voilà, quand il s’agit du daron, c’est difficile pour toi de rester sage.
— Laisse moi deviner … Sa nouvelle secrétaire qu’il culbute sur son bureau, peut être ? Ou sa boss qui le tient par la queue ? Dur, dur de deviner avec un phénomène pareil. »
Oh, Cass.
Ta bulle est cassée.