- J’te dis pas. T’es de la police ?Polly, t’as aussi pris de la bière. Cependant, c’est tout ce dont tu souviens. Impossible de faire machine arrière, tu ne te souviens pas des images de la soirée : et ce sera sûrement pire demain. Ton estomac se plaindra de tout ce que tu as pu consommer puisque dans l’ardeur tu as déjà décidé de totalement l’enflammer. Peut-être oublieras-tu une partie de ce que tu es en train de vivre avec Nastia, ou ta gorge déformera le son de ta voix.
- Moi, ivre ?… Bien sûr que je suis ivre.
C’est assumé. Tu n’as jamais besoin de te cacher quand c’est pour exposer tes tares. T’aimes bien avoir la certitude que ton image est proche de celle d’un cauchemar. Seulement, des images, tu n’en as jamais vu dans le creux de ta tête, alors ton imagination est floutée : tu ne fais qu’extrapoler.
- On sait jamais avec toi.
C’est vrai qu’avec Nastia, tu ne sais pas. Tu ne sais pas avec les autres non plus, mais il faut dire que ton attention ne se loge jamais sur les sujets étrangers. Puisse les autres réellement t’intéresser, t’es trop individualiste et égoïste pour vraiment y faire attention : tu les aimes un peu con, ou assez barrés pour suivre tes impulsions. Tu les aimes pétards, pour que chaque étincelles résonnent en explosion. Tu aimes quand ça te fait vriller, quand ils peuvent faire battre ton cœur, quand ils peuvent changer en passion la peur.
- Un bulldozer.
Les sourires s’affichent sur ton minois rougit et désespérément blanc,
Alors que tes mains tapotent contre le tissu continuellement.
- Tu vas adorer.
Dans le creux de tes poches, tu fouilles, mais t’as rien trouvé. Polly, à quoi tu t’attendais ? T’as pas la lumière à tous les étages, à trop boire : c’est le premier de tes gages. T’es pas mac Gyver, t’as pas l’étoffe d’un inspecteur, ni même d’un explorateur : t’es juste une idiote qui se prend pour un pseudo voleur. Les poches vidées, tu te résous à regarder Nastia, mais t’es pas vexée.
T’as écrasé les racines de ta sensibilité.
Tu les as brulé comme des sorcières.
Tu les as noyé pour rester forte, pas fière.
Tu les as oublié six pied sous terre.
- Alors… Oui, mais non. Je suis pas aussi con.
Dans ton état, cela reste à prouver.
Tu n'es capable que du pire.
Tu sors les mains de tes vêtements et t’écoutes Nasia sans penser : tu ne sais pas faire autrement.
Elle te donne des indications, et toi Polly, tu n’attends pas bien longtemps.
Tu n’as même pas exprimé ton contentement que tu saisis brutalement sa cheville sans un mot. Une fois le pied soulevé, tu choppes une de ses chaussures pour qu’elle puisse faire le grand saut. Puis le second talon vient dans ton autre paume : c’est toujours à toi de te salir les mains.
Tu t’avances et fait face à la fenêtre, pour lancer les deux souliers.
La fenêtre se fissure seulement, il faut dire que tu n’as pas l’étoffe ni la musculature d’un bourrin. L’alcool ne t’apporte pas non plus tout son soutien.
- Fais chier. C’est du double vitrage ou quoi ?
Comme si tu t'y connaissais...
Puis tu réfléchis pas, t’enchaines les actions.
Tu éteins toutes les réactions.
- Monte sur les poubelles. Tu vas finir et péter la fenêtre.
En fait, tu ne lui laisses pas le choix : c’était son idée, elle devra contenir ton torrent d’impulsions.