Il sommeillait vivant, si l’on peut dire ; c’est-à-dire que Ruben en embrassant laissait dans la bouche un goût amer et matinal. On aurait dit sa personnalité polie comme un bel outil dont on a meulé les bords les plus tranchants, et dont l’éclat lisse en était rendu glauque et menaçant. Pour autant, de cet outil, personne n’en saisissait trop l’usage, et la curieuse existence de Ruben interrogée par son propre néant formait alors un noyau dur de colère au cœur de la ville. Il était, pour dire les choses crûment, impropre à la vie, comme les eaux des gouttières sont impropres à la consommation, et Ruben était rendu fou par sa propre inconséquence. Ruben voudrait faire des rêves des chiens, et les étrangler comme de mauvaises bêtes. La lucidité des autres et la complaisance du vivant le dégoûte, l’artificialité de la ville lui enfonce ses doigts en matière d’illusion dans ses yeux pauvres, il voit à travers toutes les rues le fantôme intime des rêveur.euses qui se dévoile impudiquement à lui, lui, obscène, qui ne sait pas se couvrir les yeux. Ruben déteste tout cela, comme on vomit ses propres tripes.

C’était en même temps un être hypocrite qui avait toujours su bien rêver. Et même, Ruben avait su très tôt découper dans le réel des étoiles de papier pour bien décorer son sommeil. Il aimait ses nuits et jouait de cet autre lui dans lui-même sans honte particulière pour son infidélité. Ruben ne se méfiait que des éléments et jamais de la vertu ; il craignait les hommes car ils pouvaient le tuer, et jamais car ils avaient les mains assez fortes pour le faire, soit de la même façon qu’on craint le tonnerre. Pour les mêmes raisons, il ne redoutait pas de mentir, quoique le mensonge des autres lui donne envie de pleurer, et sans doute que la mort lui faisait cet effet-là aussi. La compassion de Ruben est rare et éclatée en hématomes sur le cœur des autres : il n’y a pas d’amour dans la façon qu’il a de les enlacer pour les soustraire à leur triste sort, ou alors le cadavre d’un amour, soit — dont on ne peut rien faire et où on ne peut rien cultiver, si ce n’est le regarder courir à sa perte, et ne pas avoir d'autre choix que d'être brûlé.

vif ✧ décidé ✧ envieux ✧ égoïste ✧ hypocrite ✧ menteur pour son propre confort ✧ aucune délicatesse ✧ pas méchant ✧ pas spécialement gentil non plus ✧ sanguin ✧ un peu gênant comme mec ✧ je sais ça fait rêver là ✧ il a un lapin nain ✧ c’est son fond d’écran ✧ et apparemment le seul sujet de conversation positif qui le passionne ✧ très secret de manière générale, jusqu'à son prénom ✧ généralement désagréable ou intrusif mais il a l’air ni de le faire exprès ni de s’en rendre compte ✧ dégage une forme passive mais palpable de fébrilité ✧ laisse les élèves dormir à l’infirmerie mais on sent que ça le saoule ✧ d’autres facts ensuite je suppose

Avis sur les rêves lucides Il est contre, totalement contre — il n'en parle que si on lui demande. Pour Ruben, le rêve lucide est une aberration et un crime contre soi. Il profite néanmoins de ses rêves lucides en contradiction absolue avec cet avis, avec un plaisir coupable, qui décuple le plaisir lui-même. Il vit bien avec ça, manifestement.
Qualité de sommeil 50%
Qualité de rêves 65%
Test de réalité Se pincer.
White space C'est le parc d'un ensemble d'immeuble au sein d'une ville nouvelle, de nuit, avec une balançoire et des buissons de roses. Tout est désert ; on n'y trouve que des chiens et des lapins. Une seule fenêtre et un seul réverbère sont allumés. La nuit est pleine, mais paisible.
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